mardi, mai 06, 2008

Après l'amour...

Dès que j’ai eu pris connaissance du dernier thème d'écriture, je n’ai pas eu à tordre longtemps la serpillière des sentiments dans le seau des souvenirs pour que me revienne en mémoire cette rencontre insolite avec Peter à l’hôtel La princesse et le crapaud.

Je l’appelle Peter, en toute simplicité, son nom étant impossible à prononcer.

Je l’avais croisé au fumoir, après le dîner, et nous avions sympathisé le temps de quelques digestifs. Il était en compagnie d’une créature svelte, fine et équipée à profusion de cheveux dorés et de prunelles distinctement plus bleues que l’azur du ciel. Il nourrissait manifestement pour cette personne une passion qui ressemblait à de l’huile bouillante.

Lui, en revanche, faisait partie de ces personnages qui hantent vos cauchemars jusqu’à votre dernier souffle dès la première rencontre. On aurait dit qu’il avait été fabriqué par un taxidermiste incompétent et pressé qui l’aurait surdimensionné sauf en ce qui concernait la hauteur.

Ce soir-là, il faisait une chaleur à torréfier les graviers de la cour et je ne parvenais pas à trouver le sommeil. Je quittai ma chambre pour chercher un peu de fraîcheur nocturne sur le balcon. La nuit était tellement limpide et silencieuse que l’on aurait pu entendre un escargot se racler la gorge, s’il est exact que les escargots se raclent la gorge.

Le hasard nous avait octroyé des chambres contigües et lorsque je le vis sur le balcon à côté du mien, j’ai pensé qu’il couchait dehors en raison de son nom très compliqué.

Il était appuyé sur la rambarde, parfaitement immobile, une cigarette aux lèvres. L’ensemble était emballé dans une robe de chambre rose parsemée de nounours bleus.

─ Bonsoir Peter. Lui-dis-je depuis mon propre perchoir, supposant qu’il était d’usage entre insomniaques de tuer le temps.

Il bondit de quelques centimètres en direction des étoiles.

Quand il m’aperçut, il mit son doigt devant la bouche en signe de silence.

─ Chut ! Souffla-t-il. Vous allez réveiller Hélène.

─ On ne réveille pas un volcan qui sommeille, plaisantai-je, sans être tout à fait sûr s’il s’agissait ou non d’une plaisanterie.

─ Ah ! Mon ami ! Elle est l’étoile polaire de ma vie ; l’arbre où poussent les fruits de mon bonheur. Je n’en épouserais pas une autre, viendrait-elle à moi escortée de paons, d’esclaves chargés d’ivoire et de singes savants.

Puis, il ajouta avec un clin d’œil, en désignant la cigarette qui finissait de mourir au coin de ses lèvres : « Toujours, après l’amour ! ».

1 commentaire:

Solange a dit…

Toujours récompenser une performance.