mardi, novembre 11, 2008

C'est par où ?

Ah ouich ! On a connu l'enfer !

L'équipage n'était composé que de pirates qui avaient tout à oublier, même l'avenir. Le pire d’entre eux était le cuistot. Une teigne à forme humaine qui pratiquait la politique de la pomme de terre brûlée. Quant au capitaine, il possédait certainement une dose de péché originel bien supérieure à la moyenne. Nous l'avions surnommé « C'est par où ? » car nous recherchions en vain ce putain de trésor depuis bientôt un an.

Fredy arrêta son récit et s'abîma dans la contemplation des volutes bleuâtres de sa pipe qui faisaient penser à des têtes de mort.

Lorsqu'il sentit l'atmosphère sur le point d'exploser, il fit semblant de réfléchir et lâcha enfin : Comment vous décrire « C’est par où ? » sans vous faire peur ?

Un moment ou deux passèrent encore avant qu’il ne refit surface.

Il n’avait qu’un œil et qu’une jambe, et même sa jambe de bois avait des varices. Il s’en servait pour frapper les p’tits mousses auxquels il menaçait d’arracher la tête pour la leur faire avaler ensuite ; ce qui me paraissait un contresens et difficilement réalisable.

Après avoir essuyé la tempête du siècle, nous jetâmes l’ancre dans une baie très poissonneuse que nous baptisâmes la baie Tonnière.

Les hommes les moins malades partirent avec le capitaine à la recherche de ce putain de trésor. Nous étions lourdement chargés de pelles, de pioches et de coffres. J’avais choisi de porter la boussole.

Nous pensions toucher au but lorsque nous tombâmes sur un panneau indicateur. Ces imbéciles ignares applaudirent tous de joie et se tournèrent vers moi qui étais le seul à savoir lire.

C’est par où ? C’est par où ? Alors, Fredy, c’est par où ? Ne cessait de répéter « C’est par où ? » en me regardant de son œil chalumeau.

Les indications étaient écrites dans une langue dont j’ignorais jusqu’à l’existence, mais le capitaine, qui était sur le point de cracher son âme au diable et soignait son mal par de longues rasades de rhum frelaté, avait l’humeur chagrine.

J’affirmai donc qu’il fallait aller tout droit sur un ton de certitude granitique légèrement teintée de péremptoirité.

C’est ainsi que, peu après, nous tombâmes dans un guet-apens tendu par d’horribles sauvages anthropophages.

Je fus le seul à pouvoir m’échapper de la marmite.

1 commentaire:

Solange a dit…

Fiou! une chance sinon plus d'histoire.