lundi, janvier 14, 2008

Le soir d'Halloween

Exercice d'écriture proposé par les Impromptus littéraires


Un coup de sonnette déchira l’air de mon vestibule juste au moment où le présentateur du journal télévisé informait le bon peuple des derniers discours d’un faiseur de beaux discours.
Au prix d’un effort surhumain, je me levai avec toute la dignité qu’il est possible de conserver lorsqu’on essaie de s’extraire de ce putain de fauteuil à bascule qui m’a été offert le jour de l’élection présidentielle.

Qui osait déchirer l’air de mon vestibule à une heure pareille ?

Chaussé de mes lunettes fabriquées à base de pots de yaourts et de branchages, ainsi que des pantoufles marsupilamis offertes par mon dernier petit fils, je me dirigeai vers la porte lorsqu’un bruit atroce en fendilla le chambranle qui laissa tomber une question fermée sur le carrelage avec un bruit mou « Des bonbons ou un sort ?»

La voix qui l’avait lâchée ressemblait à celle d’un cadavre parlant du fond de son tombeau. Une voix à peine humaine. Ce n’était pas comme une voix et pourtant c’était une voix.
J’avais entendu parler dans une série télévisée de l’armée du Nécromant, une horde de morts vivants qui sortait des cimetières pour attaquer la ville.

Je n’allais pas me laisser faire.

Je saisis le fusil de chasse suspendu au porte manteau, un très beau fusil juxtaposé de type Lefaucheux calibre 16 à broche, réalisé dans la seconde moitié du 19ème siècle par un artisan stéphanois ; arme de haute qualité ; beau bois en noyer, crosse anglaise quadrillée, platines et bascule nickelées et ciselées. Un cadeau de Léone.

Et j’ouvris la porte en grand.

La pluie d’orage et une énorme bourrasque de vent chargée de feuilles déjà mortes s’engouffrèrent dans mon vestibule au bord de la crise cardiaque.

Au même instant, une voiture passa en trombe et souleva une gerbe d’eau sale qui aspergea l’ensemble de mes cadeaux.

Personne. Il n’y avait personne !

Il n’y avait que cette rue, toujours la même, longée de murs gris culottés par les siècles, derrière lesquels croupissaient de vieux bâtiments compliqués, luisant de crasse et enchevêtrés les uns dans les autres à force de POS et de PLU successifs.

La situation était de celles où l’on a plus qu’à joindre les mains, lorsqu’elles ne sont pas encombrées par un fusil, lever un regard muet vers le ciel, et recommencer une nouvelle vie en essayant d’oublier.

Lorsque je refermai la porte et me retournai, mon cœur cessa de battre et une indicible explosion de stupeur me secoua de la semelle des marsupilamis jusqu’à la pointe des cheveux.

Mes lunettes en carton chutèrent sur deux gnomes encapuchonnés aux têtes de citrouille.

─ On donne c’qu’on veut, m’sieur dit le plus petit et le plus laid des deux en brandissant un paquet de bonbons.

1 commentaire:

Solange a dit…

Je me demande qui des enfants ou de l'adulte avait le plus beau déguisement?