La consigne : Le texte doit se terminer par : "A condition que tu m'en donnes" .
J’étais encore enfant, mais je me souviens très bien.
Nous nous dirigions en direction de l’horizon. Un peu vers la droite.
Plus précisément vers cette bourgade dont l’orthographe hérissée de consonnes m’égratigne la mémoire.
Igor faisait claquer son fouet pour accélérer la cadence car le crépuscule allumait les premières étoiles et c’était surtout vers huit heures, à la tombée de la nuit, que les assassins, les cyclones et les épidémies de choléra faisaient rage dans ce paisible village.
La vieille rosse, somnambule et cagneuse, qu’il qualifiait parfois de cheval dans le feu de la conversation, restait insensible aux sollicitations et nous nous faisions dépasser par d’antiques paysans, courbés sous le poids d’immenses fagots.
Il en aurait fallu davantage pour contrarier Igor, dont l’éternel sourire était un site classé, de même que le chaos de mèches entremêlées qu’il avait sur la tête, et qui évoquait la lande bretonne après les marées d’équinoxe.
Lorsque Lezghinka - c’était le nom de sa jument - eut atteint le sommet de la colline, nous aperçûmes la mendiante au bord du chemin.
Sa main tendue, sèche et noire comme celle d’un singe, sortait d’un amas de peaux de bêtes haut de trois pieds et demi à peine. Je me souviendrai toute ma vie de sa petite figure plissée, ratatinée, rugueuse et basanée comme un cuir de bottes qui auraient survécu à toutes les guerres. Sous la capuche, deux yeux rouges brillaient comme un couteau suisse. Je ne saurais dire s’ils lançaient réellement des flammes, mais ils me parurent distinctement incandescents.
Lance-lui des pièces, me dit Igor, embarrassé.
Il faisait partie de ces généreux avares qui ont constamment la main à la poche mais n’en sortent jamais rien.
Je le ferai, lui dis-je, à condition que tu m’en donnes…
1 commentaire:
Igor était grippe-sous.
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